"Il serait temps de prendre au sérieux le titre du chapitre XVIII de l'Essai sur l'origine des langues de Rousseau: "Que le sistème musical des Grecs n'a aucun rapport au nôtre". C'est ce que fait Lohmann, qui part du principe "qu'il est impossible de décrire au moyen de concepts modernes ce qui est pensé de façon grecque."
Il nous faut donc renoncer à des concepts (modernes) comme mode ou gamme afin de prendre la mesure de cette mesure que les Grecs envisageaient comme système, voire "système pafait" en son orbe et en son autarcie : construction idéale, riche a priori de tonalités qui s'appelleront lydien, mixolydien, ionien, éolien, etc., sans oublier le dorien et le phrygien qui seuls (on verra ici pourquoi) eurent la faveur de Platon (dont toute la République prend ici une nouvelle résonance) si bien que rien ne serait plus faux que de comprendre ces tonalités comme des réalités d'abord empiriques ou ethniques. Or cette construction idéale n'est possible, selon Lohmann, que sur la base du pythagorisme entendu (en un sens très large) comme soubassement de toutes les doctrines "pré-socratiques", en tant qu'articulation principielle entre mathématique, logique, grammaire et harmonie, en une mousikè qui est la source des 7 artes liberales du Moyen-Age mais dont nous ne percevons plus la profonde et rigoureuse solidarité, celle que lui confère le logos comme parole pensante et rapport mathématique.